19ème DIMANCHE (9 AOUT)

Élie vient de combattre l’idolâtrie avec beaucoup d’ardeur ; Alors sa vie se trouve en danger. Comme ses adversaires, il s’imaginait un Dieu de puissance.

Mais Dieu ne l’abandonne pas : il l’invite à se tenir là et à attendre son passage dans la brise légère.

Elie comprend alors que le vrai Dieu n’est pas celui de la violence. Ce n’est pas en massacrant les “infidèles” qu’on sauvera l’honneur du vrai Dieu. Plus tard, Jésus nous révèlera un Dieu qui n’est qu’amour et miséricorde. Comment pourrait-il en être autrement ? C’est en aimant que nous disons quelque chose du vrai Dieu.

 Paul s’était lui aussi trompé sur Dieu. Dans un premier temps, persécuteur des chrétiens, il croyait défendre l’honneur de Dieu. Mais un jour, il a rencontré Jésus sur le chemin de Damas. 

L’évangile nous aide à lutter contre les tempêtes du moment : celle des événements difficiles et des horizons bouchés, celle du Covid 19 qui cause beaucoup de dégâts, celle de la précarité et de l’exclusion.

Jésus est resté dans la montagne... loin des disciples qui luttent contre la mer et contre le vent. Les disciples sont en difficulté, et Jésus prolonge sa prière. Pourtant, Jésus ne perd pas le souci des apôtres. Jésus est sur la montagne avec le Père et sur la mer avec nous. C'est seulement dans le dernier quart de la nuit qu'il rejoint la barque en marchant sur les eaux, à bord, c'est l'affolement. Jésus, de loin, calme son monde : "Confiance, c'est moi, n'ayez pas peur !". Jésus n’est jamais là pour affoler ni pour faire peur ! Cette voix, dans le vent, est bien celle de Jésus, et la silhouette lui ressemble. Mais comment un homme peut-il être debout sur le lac en furie ?

Pierre réagit le premier à la voix. C'est dans les grandes occasions que Pierre se révèle, et Jésus ne s'est pas trompé en le choisissant. Il faut prendre une décision : si vraiment c'est le Seigneur, il faut l'accueillir tout de suite. Mais comment savoir ? Et Pierre a cette intuition géniale de la foi : si c'est le Seigneur, je peux être où il est, je peux le rejoindre là où il parle, je peux tenir debout par sa puissance. Alors il dit : "Seigneur, si c'est bien toi, ordonne-moi de venir vers Toi sur les eaux !"

Et dans le vent, la même voix calme se fait entendre : "Viens !". C'est bien le Seigneur ! D'un bond, Pierre se retrouve sur l'eau. Il marche, comme Jésus a marché ! Mais le vent ne faiblit pas ; Pierre peine ; il regarde ses pieds plutôt que le Christ et il prend peur ; il pense maintenant plus à la force du vent qu'à la force de Jésus. Et voilà qu'il enfonce : "Seigneur, sauve-moi !"

Pierre saisit la main que Jésus lui tend, et cette main, rien que cette main, le raffermit sur l'eau. "Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ?"

Jésus aime l'audace de Pierre. C'est le plus beau geste que la foi ait suscité chez lui. Pierre faisant une folie de confiance : quelle récompense pour Jésus ! quel espoir pour l'avenir !

Mais la peur a tout gâché. Non pas tout, car le geste était beau, et à lui seul il a comblé Jésus de joie. Le brave Pierre : en voilà un qui sait compter sur son Seigneur !

Quand ils montent tous deux dans la barque, brusquement le vent tombe, comme s'il voulait s'agenouiller, lui aussi, avec les disciples, comme s'il se mettait à l'unisson liturgique.

"Vraiment, tu es Fils de Dieu", disent les compagnons de Pierre. La foi du Rocher a été contagieuse. Il se souviendra longtemps de cette nuit-là, et nous aussi, nous pouvons nous en souvenir pour nourrir notre espérance, car cette aventure spirituelle que Pierre a vécue est pour nous l'histoire du second appel, non pas le premier appel que nous avons perçu, comme Pierre au début : "Viens à ma suite", mais le second appel qui vient tôt ou tard après les tempêtes ou dans les tempêtes de la vie, au moment où l'on ne peut plus compter sur rien, hormis Dieu.

Nous luttons, longtemps parfois, contre les vents contraires de la vie, contre les bourrasques de l'aventure fraternelle, contre les tentations de facilité, contre l'usure de la joie, contre la lassitude de prier ou les refus de dialogue. Mais rien n'y fait, car Jésus semble ne pas être vrai­ment là où nous souffrons. En réalité, dans la tempête il s'est rapproché de nous. Alors, dans un sursaut de foi, nous disons : là où il est, je peux être, moi aussi ; là où il va, je veux aller, moi aussi ; pour moi, vivre, c'est le Christ.

Et c'est bien cela que Jésus attend de nous : une confiance audacieuse, au-delà de toutes nos impressions, au-delà des agitations dans notre cœur ou notre intelligence. Mais désormais c'est lui seul qu'il faut regarder. Quand on se regarde soi-même, on perd de vue l'horizon. Quand on regarde ses pieds, on enfonce.

C'est une aventure personnelle dans une aventure communautaire que nous fait vivre la foi.

Tous peinent à faire avancer la barque ; tous se méprennent sur l'identité de Celui qui vient à eux, tous ont peur à l'approche de Jésus, tous se prosternent ensuite dans la barque.

Pierre seul s’aventure à demander au Seigneur : "Ordonne-moi de venir à Toi". Pierre seul entend l'appel personnel de Jésus : "Viens !". Pierre seul se sent enfoncer dans la mer et crie : "Seigneur, sauve-moi !". Seul il connaît la seconde peur, alors même qu'il s'approche de Jésus. Seul il a perçu la force de la main du Christ. Cette force il la transmettra aux autres à l’avenir !

Nous connaissons, nous aussi, ces appels du Seigneur qui nous arrivent dans la tempête ; "Viens", dit Jésus. " Reviens à moi". Mais cela nous semble impossible, parce que les bourrasques de la vie sont trop fortes, parce que notre vie nous apparaît sous le signe de l'échec, parce que, pour Le rejoindre, il faudrait marcher sur la houle, avancer, sans appui, sur un chemin mouvant. O Seigneur donne-nous de toujours tourner le regard vers Toi et de garder notre main dans ta main que nous tend !