La conduite de Jésus est scandaleuse aux yeux des pharisiens et des scribes : il fait bon accueil aux publicains et aux pécheurs ! Et les voilà qu’ils viennent tous à Jésus pour l'écouter. Le langage du Christ leur allait-il droit au cœur, ou était-ce le moyen de l’épier, de chercher la faille du discours de Jésus pour le condamner ? Alors tombe l'accusation : il leur fait bon accueil ! « Que l'homme ne fréquente pas l'impie, fût-ce pour étudier avec lui la sainte Ecriture », demandait un précepte rabbinique. Mais Jésus fait pire : il mange avec eux et contracte ainsi une impureté légale.

Alors, à la manière orientale, au lieu de fournir des arguments, il leur raconte une histoire, une parabole dont ils n'auront pas de peine à saisir la pointe. Un berger a cent brebis. Ce n'est pas énorme, comparé aux milliers qu'avaient les riches. Pour un pauvre, un petit berger : une de perdue, cela compte !

Une femme a dix drachmes. C'est bien toute sa fortune. Elle en perd une, l'équivalent d'une journée de travail. Pour elle, la perte est importante.

Ces pharisiens et scribes, nous-mêmes en sommes-nous conscients ?

Déjà, Jésus nous explique comment Dieu voit le pécheur : le pécheur est quelqu'un que Dieu a perdu. Il appartient à Dieu pour lequel il est précieux. Chacun a du prix à ses yeux, puisque c’est le prix du Fils, c’est le prix de la croix ! Un homme se perd et c'est l'avoir de Dieu qui se perd ! Jésus ne dissimule pas le péché : le pécheur est bel et bien dit, vu comme tel. Mais Dieu le considère d'abord comme son avoir qu'il a perdu. Il cherche, et pas seulement en un rapide tour d'horizon, mais avec ténacité, jusqu'à ce qu'il le retrouve. La femme est montrée balayant la maison, retournant toutes ses affaires, si peu nombreuses soient elles, et elle chercher avec soin. Jésus n'a-t-il pas été jusqu'au bout de sa peine, jusqu'à la croix ? Et que se passet-il quand le berger retrouve sa brebis, quand la femme retrouve sa pièce ? L’un prend la brebis sur ses épaules. Et il est tout joyeux, au point qu'il invite ses amis et voisins – l’autre invite aussi ses amies et voisines - pour leur dire : « Réjouissez-vous avec moi. »

Les sentences rabbiniques prêtaient à Dieu une bien autre joie : « C'est une joie pour Dieu quand ceux qui l'ont mis en colère disparaissent du monde ».

On mesure face à ces deux joies, la distance entre le Dieu des pharisiens et celui de Jésus. Vraiment, ce n'est pas le même. Le ciel se réjouit ! Même les anges de Dieu participent à sa joie. Quoi de plus grand !

Ici encore, le péché n'est pas innocenté, bien au contraire. C'est qu'il est au contraire effroyable, si la conversion d'un seul pécheur provoque un tel soulagement. Quel Dieu ! Car c'est de Dieu qu'il s'agit, c'est lui le personnage premier. C'est sa peine pour son bien qui lui tient à cœur, qui nous est décrite. C'est lui qui est dit joyeux des retrouvailles. Oui, Dieu est ainsi, et l'on n'a pas de peine à comprendre pourquoi les pécheurs venaient écouter cette bonne nouvelle et dire devant le Seigneur Jésus Christ, dans leur cœur comme sur leurs lèvres : prends pitié de moi pécheur !

Revenons, pour terminer à la première lecture :

Les Hébreux se sont détournés de Dieu parce que Moïse tarait à revenir, ils le croyaient mort ! Il se sont alors fabriqué un dieu en forme de veau, puis ils se sont prosternés devant lui. Dieu s’enflamme et menace d’exterminer son peuple infidèle. Qu’est-ce que nous aimerions que Dieu extermine les méchants, il ne resterait que des purs sur terre, autrement dit : personne ! Plus tard, les croyants comprendront que ce n’est pas Dieu qui punit ; c’est nous qui faisons notre malheur en nous détournant de lui. Les Hébreux ont fait connaissance avec un Dieu libérateur. Dieu. les a libérés de l’esclavage d’Egypte pour les conduire vers la Terre Promise. Mais ils se sont vite détournés de Dieu et sont retombés dans le péché.

Face à la menace qui pèse sur son peuple, Moïse se met à supplier le Seigneur. C’est un exemple qu’il nous donne. Nous sommes tous plus ou moins portés à dénoncer les coupables et à les enfoncer. On ne voit que le mal chez eux. Cela crée un climat malsain. Mais le texte biblique d’aujourd’hui nous invite à rejoindre Moïse qui supplie le Seigneur. Comme lui, nous voyons tout ce qui va mal et nous le portons dans notre prière. Prends pitié de ton peuple Seigneur ! Prends pitié de nous qui tombons souvent, t’oubliant, t’ignorant, délaissant nos frères et nos sœurs que tu mets sur notre chemin….